LES MAITRES : UN FAIT, UN IDÉAL

 

LA PLACE DU COMBATTANT

LE TÉMOIGNAGE DES RELIGIONS

HYPOTHÈSE

PREUVE HISTORIQUE

L'EXPÉRIENCE INDIVIDUELLE

COMMENT POUVONS-NOUS TROUVER LES MAITRES ?

H. P. BLAVATSKY

LA DOCTRINE SECRÈTE

LA VOIX DU SILENCE

CONNAISSANCE PERSONNELLE

LE CHEMIN DE L'ADEPTAT

RÉINCARNATION

VIVEZ NOBLEMENT

FRATERNITÉ

LE SENTIMENT DE L'UNITÉ

IDÉAL SUBLIME

 


LA PLACE DU COMBATTANT


Monsieur Sinnett, mes amis 1,
Il y a près d'un an, j'étais sur cette même estrade, pour parler en public dans cette salle à mon retour de l'Inde. Depuis lors, bien des choses se sont passées. Moi-même, j'ai voyagé jusqu'au bout du monde, vers des contrées dont nous pouvons dire qu'elles sont sous nos pieds ; puis de là, je suis rentrée dans l'Inde et l'ai traversée à nouveau du sud à l'extrême nord ; enfin, je suis revenue de l'Inde ici, sachant que pendant mon absence, bien des attaques s'étaient déchainées, bien des difficultés et bien du trouble avaient surgi. D'abord, dans ces lointains antipodes, me parvint une rumeur de doute et de défi, un bruit de prétendues révélations et [32] de violentes insultes. Puis en me rapprochant, en arrivant aux Indes, j'obtins plus de renseignements, j'appris les détails de l'attaque. Mais j'étais encore trop éloignée pour prendre une part active à la lutte, et, liée par d'autres devoirs, il m'était impossible de me rendre sur-le-champ dans le pays où, en apparence du moins, cette lutte était la plus chaude. Quand le temps vint où mes engagements me permirent de revenir, quand vint le temps où, une fois encore, je me retrouvai dans cette salle en face d'un public anglais, je crus bien faire en choisissant comme sujet le point autour duquel l'attaque réelle avait fait rage, et de traiter dans les premières paroles que je prononcerais dans ce pays le sujet le plus réellement important sur lequel les commentaires s'étaient exercés en mon absence. Car je sais qu'en quelque endroit que se dresse un obstacle, c'est là que doit se trouver le brave soldat, et je n'ai pas oublié qu'un écrivain de notre langue anglaise a parlé de ceux qui soutiennent la religion lorsqu'elle triomphe, auréolée de splendeur, mais qui ont honte d'être à ses côtés dans l'ombre et sous l'outrage, humiliés qu'ils sont de la voir couverte de haillons et non drapée dans la pourpre.
Mais j'ai appris au cours d'une vie agitée que c'est au moment de l'attaque qu'il faut se [33] défendre ; que ce n'est pas quand le soleil brille et que tout est pour le mieux que la parole est le plus nécessaire, mais bien lorsque les nuages orageux s'amoncèlent et que de tous côtés surgissent des obstacles. C'est au moment où la vérité est en bute aux attaques qu'il faut montrer sa loyauté envers elle, c'est lorsque le savoir est assailli de tous côtés qu'il faut lui rester fidèle ; et je jugerais traitres à la vérité et renégats envers leur conscience ceux d'entre nous qui, connaissant la réalité de l'existence des Mahatmas, se permettraient de se taire parce qu'on cherche à leur imposer silence par le ridicule, ou se permettraient de nier leur savoir parce que le fait auquel il se rapporte a été en bute aux outrages de la fraude et aux assauts de la mauvaise foi. Voilà pourquoi j'ai choisi ce sujet à ma première allocution et pourquoi j'apporte devant vous des témoignages que je considère dignes de votre examen et pour lesquels je réclame toute votre patiente attention et votre jugement le plus murement pesé. [34]

1 Conférence faite en 1896, présidée par M. Sinnett.

 


LE TÉMOIGNAGE DES RELIGIONS


Les Maitres : un fait, un idéal ; j'ai choisi ce double titre car quelques-uns ne connaissent pas en tant que fait Leur existence qui n'en est pas moins pour eux un idéal précieux et plein d'inspiration. Il y a des membres de notre Société qui ne croient pas en l'existence des Mahatmas. Ils sont nombreux ceux qui font partie de la Société et qui n'ont ni connaissance ni foi à ce sujet ; le règlement de notre Société est de ne demander à ceux qui y entrent aucune autre profession de foi que celle qui a trait à la fraternité humaine à l'exclusion de toutes les distinctions de surface. De sorte que, dans les limites de la Société, on peut trouver des membres qui croient et d'autres qui ne croient pas en l'existence présente ou passée de ces grands Instructeurs. Mais moi, qui crois en Eux et qui sais qu'ils existent, je ne parle pas ici au nom de la Société qui n'a pas de dogme, mais en mon nom et en celui d'autres qui partagent avec moi cette foi ou cette connaissance, et je vais vous présenter ce que je crois être une preuve rationnelle, digne de considération, preuve à laquelle vous pourrez [35] réfléchir à loisir pour vous former à son sujet l'opinion qu'il vous plaira. Je parle aussi pour l'amour de l'idéal, car les idéals de la race sont précieux et l'on ne doit pas les laisser insulter à la légère ni permettre qu'on nie leur existence. Car, en dépit du vain rire dont on s'est servi comme d'une arme, il est grand cet idéal des Mahatmas (mot qui, en sanscrit, signifie simplement grand Esprit), il est grand en dépit du rire et du ridicule et de tous les bavardages dénués de sens dont ce nom a été l'objet. Cette moquerie est un danger qui menace un grand idéal dont la valeur passe de beaucoup les bornes de la Société Théosophique. Car il n'est pas une seule grande religion qui ait élevé et purifié l'esprit des hommes, pas une profonde doctrine ayant conduit des millions d'êtres à la connaissance de la vie spirituelle et des possibilités de l'évolution humaine, il n'en est pas une qui n'ait basé sa foi sur un Homme Divin, qui ne reconnaisse pour son Fondateur dans le passé l'une de ces âmes puissantes qui ont apporté au monde la connaissance de la vérité spirituelle. Remontez aussi loin que vous voudrez dans le passé, prenez la doctrine qu'il vous plaira ; toutes sont basées sur ce même idéal, toutes reconnaissent pour leur Fondateur un Homme dont la vie est divine. [36] Autour de cet idéal se groupent tous les espoirs des hommes et aussi les destins futurs de l'humanité. En effet, à moins que l'homme ne soit un être spirituel, à moins qu'il n'ait en lui-même la possibilité d'un développement spirituel, à moins qu'il n'existe quelque preuve évidente d'hommes devenus parfaits montrant qu'il ne s'agit pas là d'un rêve pour l'avenir, mais bien d'une réalité atteinte déjà par notre race ; à moins qu'il ne soit vrai que devant nous tous s'ouvrent les mêmes possibilités infinies dont l'existence a été démontrée dans le passé par ceux qui ont réussi, toutes les espérances des hommes sont dépourvues de fondement, les aspirations humaines vers la perfection ne comportent aucune certitude de réalisation, l'humanité enfin reste une chose éphémère et non l'héritière d'une immortalité sans bornes.
Que l'homme puisse devenir un Dieu, voilà ce qui a inspiré les plus grands de notre race, ce qui a réconforté les plus malheureux au milieu de leurs angoisses et auréolé l'avenir d'un espoir qui n'est pas mensonger. Voilà pourquoi je défends cet idéal. Qu'est, en effet, le Mahatma ? C'est l'homme devenu parfait, l'homme qui a atteint l'état d'union avec la Divinité ; l'homme qui, par lents degrés, a développé en lui les facultés latentes de la nature [37] spirituelle et se dresse triomphant là où nous luttons. Chaque religion, ai-je dit, lui a rendu témoignage. Vous voyez que toutes les religions du monde reconnaissent l'existence dans le passé d'un Divin Instructeur. Que vous preniez le nom de Zoroastre en Perse, celui de Manou dans l'Inde ou de Bouddha à une époque plus moderne ou celui du Christ en Palestine, chacun d'eux désigne l'Homme divin qui apporta la certitude de la perfection humaine à tous ceux qui entrèrent dans sa sphère de rayonnement. Voilà l'idéal qui a été insulté de nos jours, et c'est pour l'amour de cet idéal que me voici devant vous pour vous parler ce soir.


HYPOTHÈSE


Et maintenant, quel plan allons-nous suivre dans notre démonstration ? Je me propose d'indiquer d'abord que l'hypothèse en question est fort vraisemblable en raison des lois de l'évolution naturelle, ceci très brièvement et pour nous amener à la preuve positive. Puis je pense passer à la preuve de l'existence dans le passé de ces hommes devenus divins, puis arriver à la preuve de leur existence actuelle, et enfin, car sans cette conclusion notre conférence n'aurait [38] pour nous aucun résultat pratique, je montrerai comment il est possible aux hommes de devenir parfaits, je tracerai tout au moins une esquisse légère des méthodes du devenir de l'Homme Divin. Envisageons donc d'abord l'hypothèse que l'existence des Maitres est vraisemblable en elle-même et conforme à la loi d'analogie dans la nature telle que nous l'observons autour de nous et que nous la trouvons dans le passé. Peu de gens actuellement, je pense, contesteront le fait de l'évolution. Peu nieront que notre race progresse et que, cycle après cycle, nous trouvions des nations qui avancent et atteignent des sommets de plus en plus élevés dans le domaine de la connaissance et dans celui du développement.
Si l'on considère l'immense période de temps écoulée depuis la première apparition de l'homme sur la terre, si l'on considère d'autre part les différences énormes que nous constatons actuellement entre le sauvage le plus primitif et le type d'homme le plus élevé tel qu'il est généralement connu, si nous rapprochons ces différences dans le présent des longues périodes de temps requises par l'évolution qui nous a précédés, je ne pense pas qu'il soit théoriquement irrationnel ou absurde de prétendre que chez certaines individualités l'évolution ait [39] pu être portée à un degré aussi supérieur par rapport à celui auquel est parvenu l'homme le plus hautement civilisé de nos jours, que l'est celui-ci par rapport au type le plus primitif de sauvage existant encore actuellement. Et ce n'est pas tout. Non seulement nous avons d'énormes périodes de temps derrière nous, mais encore il existe des vestiges de civilisations puissantes qui montrent que la race a atteint des cimes élevées tant en sagesse qu'en philosophie et en science et en religion il y a des milliers et des milliers d'années, je pourrais dire des centaines de milliers d'années. Car, en regardant en arrière, vous trouverez les traces de puissantes civilisations, impliquant la présence d'hommes du type le plus élevé, et il serait peu rationnel de supposer que cette évolution dont on parle tant n'ait été que flux et reflux, ne laissant rien comme résultat, rien de plus que des périodes successives de haute civilisation et d'extrême barbarie, puis de civilisation recommencée sans aucun chainon qui assure la continuité de la connaissance.
Il n'est pas tout au moins impossible, et dans quelques instants nous verrons qu'il est probable, que hors de ce passé puissant quelques hommes aient surgi, s'élevant de plus en plus haut et portant en quelques individus la race [40] humaine au même degré de perfection où la race entière doit lentement parvenir à son tour. Ce n'est pas impossible ni même improbable si l'on se souvient que le progrès est la loi de la nature et qu'on songe aux énormes périodes de temps durant lesquelles a vécu l'humanité.


PREUVE HISTORIQUE


Mais laissons cette possibilité dont je ne m'occupe que parce qu'il est bon de nous débarrasser dès le début de l'idée que cette hypothèse est en elle-même impossible et absurde, pour nous tourner vers le témoignage de l'histoire. Voyons si l'histoire ne nous montre pas de temps en temps quelque figure gigantesque qui s'élève bien au-dessus et au-delà des hommes de son temps et de la stature habituelle de l'humanité. Voyons s'il n'existe pas de preuve irréfutable de ce que ces hommes ne sont pas que le fruit de l'imagination populaire, qu'ils ne sont pas seulement des hommes du passé dont la tradition exagère le mérite et qui nous apparaissent grossis, pour ainsi dire, à travers la brume des siècles. Je parle de ces grands Êtres auxquels j'ai fait allusion, qui ont été les Fondateurs des grandes religions du [41] Monde. Non seulement il existe à leur sujet une tradition ininterrompue et les religions subsistent que ces Hommes fondèrent, mais il y a plus qu'une tradition, plus que le fait d'une religion qui a grandi, il y a une littérature définie, spéciale, dont l'antiquité n'est contestée par aucun savant, bien que quelques-uns lui attribuent une antiquité plus grande que celle que d'autres sont disposés à lui reconnaitre. Prenez les dates postérieures, elles serviront mon plan quoique je ne les considère pas comme exactes. Prenez les dates plus récentes que pourraient vous indiquer les orientalistes qui ont étudié la littérature de la Chine, celles de l'Inde et de la Perse sans parler d'époques plus rapprochées. Vous trouverez là certains livres considérés comme sacrés, des livres que la religion proclame être d'une antiquité qu'on peut dire immémoriale. Chez les Chinois vous trouverez des livres sacrés anciens, chez les Parsis, disciples de Zoroastre, leurs livres traduits aussi à présent dans votre langue. Vous avez dans l'Inde les Vedas, les Upanishads, sans parler des oeuvres plus récentes, et je pourrais, sans craindre un démenti, vous donner de longues listes d'oeuvres puissantes, considérées comme Écritures sacrées par les fidèles de ces religions. Par qui ces livres [42] ont-ils été écrits, et d'où vient la sagesse qu'ils renferment ? Le fait qu'ils existent est évident, et celui qu'il faut qu'ils aient des auteurs ne peut guère être contesté. Et cependant ces oeuvres d'une antiquité si reculée, révèlent une profondeur de connaissance spirituelle, une profondeur de pensée philosophique, une profondeur de pénétration de la nature humaine et une profondeur d'enseignement moral si merveilleuses que les esprits les plus grands de notre temps aussi bien dans le domaine de la morale que dans celui de la philosophie sont forcés d'admettre que ces écrits dépassent ce qu'ils peuvent produire de plus grand et que le monde moderne n'a rien à leur comparer qui en approche de loin pour la sublimité. Ce n'est pas une question de tradition, mais de livres, non une question de théorie, mais de fait ; car si ces livres sont si grands, leur morale si pure, leur philosophie si sublime et si vaste le savoir qu'ils renferment, leurs auteurs ont dû posséder toute la sagesse que vous y trouvez contenue. Et la foi de millions et de millions d'hommes témoigne de la réalité de cette vérité spirituelle, des nations sont guidées par les enseignements qui ont été transmis par cette voie. Mais ce n'est pas tout. Ces enseignements sont semblables en quelque [43] lieu que vous les trouviez. C'est le même enseignement de l'unité de la Vie Divine d'où a surgi l'univers, le même enseignement de l'identité entre l'Esprit dans l'homme et l'Esprit dont est sorti l'univers ; le même enseignement qui affirme que l'homme, à l'aide de certaines méthodes, peut développer en lui la Vie spirituelle et parvenir, non seulement à l'espérance et à la foi, mais à la connaissance positive du divin. De sorte que de ces temps reculés nous reste au moins un fait qui ne peut être nié : c'est que des hommes vécurent dans ce passé si ancien dont la pensée fut assez grande, la morale assez pure, la philosophie assez sublime pour survivre aux naufrages de la civilisation et résister à la force destructrice du temps, et que de nos jours vos orientalistes traduisent pour l'édification du monde moderne ce que de grands hommes du passé ont enseigné et trouvent les pensées les plus sublimes auxquelles la race ait donné naissance dans ces Écritures qui sont venues jusqu'à nous des temps les plus reculés.
Que des hommes vécurent qui furent bien plus grands que nous sommes et dont le savoir dépasse de beaucoup le nôtre, que nous ayons toujours à apprendre en philosophie et dans les choses spirituelles de ces Maitres du passé [44] qui enseignèrent il y a des milliers d'années, c'est un fait qui ne peut être contesté. Qu'il y ait eu dans le passé des Hommes divins que nous nommons Mahatmas, qu'ils aient laissé le témoignage de leur existence dans cette forte et sublime littérature, voilà le premier point de notre argumentation, savoir, la démonstration de l'existence dans le passé, la preuve que de tels hommes ont vécu et enseigné et que par leur enseignement ils ont guidé et aidé des millions d'êtres humains. Que leur enseignement ait été identique dans ses grandes lignes et dans sa puissance morale, que les vérités spirituelles qu'il énonce aient été transmises sans changement à travers les siècles ; voilà ce dont nous pouvons parler avec certitude, jusque-là le sol est ferme sous nos pieds.
Dans cette littérature les affirmations en appellent à l'expérience humaine. Non seulement elles disent que certaines choses existent, mais encore que ces choses peuvent être connues. Elles ne se contentent pas de proclamer la réalité de l'existence de l'âme, elles ajoutent que cette réalité peut être prouvée. De sorte que la caractéristique de cet enseignement est d'exposer certains faits qui demeurent vérifiables en tout temps, fournissant ainsi des preuves constamment accumulées de l'existence réelle [45] de Ceux qui, les premiers, apportèrent au monde ces affirmations.


L'EXPÉRIENCE INDIVIDUELLE


Passons au prochain point de notre démonstration, à savoir que ces témoignages ont été vérifiés par l'expérience et continuent à l'être de nos jours. Prenez, par exemple, un pays comme l'Inde. Vous trouverez là une tradition ininterrompue jusqu'aux temps actuels, tradition qui dit qu'il y a toujours eu des Instructeurs qu'on peut trouver, Instructeurs qui possèdent la connaissance dont il est parlé dans les livres en question, qui peuvent ajouter l'enseignement pratique aux affirmations théoriques et rendre possible la vérification par l'expérience de ce qui est dit être vrai dans la littérature à laquelle j'ai fait allusion. Demandez à n'importe quel Indou de notre temps son opinion sur cette question, s'il n'a pas subi l'influence des idées occidentales et que vous puissiez gagner sa confiance, il vous dira qu'il a toujours existé dans sa patrie la croyance que ces Hommes ont vécu dans le passé et continuent de vivre dans le présent ; qu'Ils se sont retirés de plus en plus des lieux [46] habituellement fréquentés par les hommes ; qu'à mesure que le matérialisme faisait son chemin et que décroissait la spiritualité, il est devenu de plus en plus difficile de les découvrir, mais qu'enfin on peut toujours parvenir jusqu'à Eux à l'occasion et que les premières étapes du Sentier sont ouvertes à qui veut les franchir.
Non seulement cette croyance existe, mais encore vous trouverez dispersés par tout le territoire de l'Inde beaucoup d'hommes qui, sans avoir atteint encore le niveau des Mahatmas, ont gravi certains degrés supérieurs au plan physique et développé en eux-mêmes certains pouvoirs et certaines capacités qui seraient considérées par tout Occidental ordinaire comme impossibles à atteindre. Je ne parle pas en ce moment des Mahatmas, mais des centaines de Yoguis, comme on les appelle, dispersés dans les jungles et les montagnes de l'Inde, dont quelques-uns exercent couramment des pouvoirs remarquables, pouvoirs qui ici sembleraient invraisemblables, mais dont il existe des témoignages toujours plus nombreux venant de la bouche des voyageurs qui recueillent et rapportent les faits qu'ils ont contrôlés par eux-mêmes. Car les premiers degrés du développement de l'homme intérieur ne sont pas si difficiles à gravir et dans un pays comme l'Inde, [47] où l'on n'a pas à surmonter l'obstacle du scepticisme parce que cette croyance y existe depuis des milliers d'années, vous trouverez beaucoup d'hommes exerçant les pouvoirs psychiques inférieurs et quelques-uns qui ont de beaucoup dépassé ce stade et exercent soit les pouvoirs psychiques supérieurs, soit les véritables pouvoirs spirituels de l'homme. Et vous pourrez en trouver qui possèdent l'expérience personnelle, vous pourrez en trouver qui connaissent personnellement des Instructeurs, des Maitres qui exercent leurs disciples sur le sentier supérieur de ce qu'on appelle la Râja Yoga ou Yoga Royale, c'est-à-dire la Yoga qui tout d'abord exerce le mental plus que le corps et travaille au moyen de la concentration de l'esprit, de la méditation et de l'évolution des facultés mentales supérieures si discutées ici.
Par un système défini d'entrainement, ces hommes se sont rendus capables d'employer consciemment des pouvoirs de l'esprit permettant à celui qui les possède de sortir des limitations physiques, et, en se libérant du corps, de recevoir un enseignement qu'il peut après apporter à la conscience inférieure et imprimer sur le cerveau physique, de manière à prouver par sa science l'existence réelle de l'enseignement reçu et l'existence de son maitre par la [48] connaissance qu'il tient de Lui. Voici donc un nouveau point de notre démonstration rendu évident. Vous m'objecterez avec raison que cette évidence n'est pas accessible à la majorité d'entre vous. Mais vous reconnaitrez certainement, en êtres raisonnables que vous êtes, que, si vous désirez la connaissance, il vous faut la chercher là où on peut la trouver, et qu'il est aussi absurde de la part de certains hommes qui n'ont jamais fait de recherches à ce sujet, ni même essayé d'en faire, et qui n'ont jamais voyagé, de s'installer ici à Londres dans un cabinet de travail pour écrire sur un sujet qu'ils ne connaissent pas, qu'il serait absurde de la part de quelque Indou ignorant qui ne s'est jamais occupé le moins du monde de vos expériences occidentales, mettons de l'Institut Royal, de déclarer celles-ci absolument impossibles et grotesques, parce que lui-même n'est jamais venu ici et n'a pas eu l'occasion de les voir exécuter. Il vous faut adapter envers le témoignage une attitude rationnelle et, si vous ne pouvez vous-même entrer en contact avec certains faits, avec certaines phases de la vie humaine, il vous faut, ou bien rester ignorants, et vous devez alors garder le silence, ou bien il vous faut accepter le témoignage de ceux qui ont fait des recherches conscientes et [49] vous apportent le résultat de leurs investigations.


COMMENT POUVONS-NOUS TROUVER LES MAITRES ?


Ceci m'amène au prochain argument de ma démonstration. Supposons que des Hommes semblables aient existé dans le passé, supposons que nous admettions, comme le fait toute religion pour son propre Fondateur bien qu'elle puisse le contester en ce qui concerne les Fondateurs d'autres religions, supposons, dis-je, que nous admettions que dans le passé des Hommes divins aient vécu et que, croyant à l'immortalité de l'esprit, nous soyons forcés d'admettre qu'Ils existent encore en quelque lieu s'Ils ont jamais existé. La prochaine question qui se posera à nous sera celle-ci : Ces Hommes du passé existent-ils actuellement ? Peut-on arriver jusqu'à Eux ? Est-il possible de les connaitre ? Et y en a-t-il d'autres qui aient atteint un degré semblable et dont l'existence puisse être prouvée à l'aide d'arguments au moins vraisemblables ? Existent-ils toujours ?
Ici je vais me servir de l'argument que j'adopterais si j'essayais de vous prouver [50] l'existence d'une personne quelconque, habitant un pays que vous n'ayez pas visité et vivant dans des conditions que vous n'ayez pas expérimentées par vous-mêmes. Je considère comme impossible que cela puisse être démontré dans tous les cas sans exception. Je ne puis pas vous démontrer, par exemple, l'existence du comte Tolstoï. Si vous n'allez pas en Russie, qu'il ne vienne pas ici et que vous n'ayez pas l'occasion de le rencontrer, je ne puis pas vous donner de démonstration absolue de son existence. Mais je puis vous fournir des témoignages susceptibles de convaincre tout homme raisonnable ; je pourrais vous donner des témoignages qui seraient acceptés par n'importe quel tribunal. Je pourrais vous montrer qu'il n'y a pas de raison de nier son existence uniquement parce que vous ne l'avez pas rencontré personnellement et obtenu par là ce qu'on appelle une preuve oculaire de son existence. [51]

 

H. P. BLAVATSKY


Or quelle est la preuve de l'existence d'Hommes divins, d'Hommes parfaits, vivant actuellement, accessibles dans certaines conditions ?
Quel témoignage puis-je vous offrir de ce fait ? Beaucoup d'entre vous, sans doute, protesteront contre le premier de mes témoins ; mais ce n'est pas cette protestation qui me fera taire son nom, je parle de H. P. Blavatsky. Je connais les attaques qui, de tous côtés, ont été dirigées contre elle. J'ai lu les plus récentes qui, pendant mon absence, ont été lancées contre elle, et en face de ces attaques, après les avoir lues et soigneusement lues, je dis qu'il reste suffisamment de preuves fournies par elle et que ces attaques n'affaiblissent en rien, preuves assez convaincantes pour être soumises à votre examen et pour obtenir l'assentiment d'hommes raisonnables. H. P. Blavatsky est accusée de mensonge, accusée de mauvaise conduite, accusée de n'être rien de plus qu'un escroc, un charlatan et un imposteur ; mais certains faits demeurent, avec lesquels vous serez forcés de compter même si [52] vous croyez, ce que je ne fais pas, en la véracité des accusations exagérées portées contre elle. Admettez pour un moment – ce que je nie d'ailleurs – mais admettez si vous le voulez l'une des pires parmi ces accusations ; qu'elle n'ait eu aucune espèce de contact avec les Mahatmas, qu'elle les ait inventés, qu'ils n'aient pas existé hors de son imagination et que tout ce qu'elle a fait ait été fausseté, que chacun de ses actes et chacune de ses paroles aient été inspirés par l'intention de tromper. Il vous faut tout de même prendre acte des faits de sa vie et de ceux contenus dans ses livres.


LA DOCTRINE SECRÈTE


Il vous faut compter avec le livre connu sous le nom de Doctrine Secrète, et si vous voulez le comprendre, il faut le lire avant de le mettre de côté et l'étudier avant d'en rire. Je dis cela intentionnellement parce que j'ai lu l'Appendice dans lequel M. Coleman dit que cette oeuvre est pleine de plagiats et qu'il peut prouver en maints endroits que l'auteur a puisé son savoir dans d'autres livres ; il ajoute que c'est ainsi que s'expliquerait le savoir qui y est renfermé. Mais ce qu'il vous faut considérer est [53] ceci, c'est qu'elle n'a jamais prétendu avoir découvert la connaissance qu'elle apportait au monde, que sa théorie est que cette sagesse remonte à un passé immémorial et peut être trouvée dans tout livre sacré, dans toute philosophie, et que l'objet même de cet ouvrage est de faire des citations prises de partout, des Écritures de toutes les religions, des écrits de tous les peuples, pour prouver l'identité de l'enseignement et l'antiquité de la doctrine. Ce qui est nouveau dans ce livre ce n'est pas les faits qu'il renferme. Ce qu'il y a de nouveau dans ce livre ce n'est pas ce que les orientalistes y ont trouvé et qui peut être retrouvé dans l'un ou l'autre des livres sacrés du monde. Ce qui est nouveau c'est la perception qui a permis à l'auteur de choisir parmi tous ceux-ci les faits qui composent la conception unique et puissante de l'évolution de l'univers, de l'évolution de l'homme, la synthèse cohérente de toute la cosmogonie. Ce qui lui mérite le titre de plus grand Instructeur de notre temps c'est d'avoir possédé le savoir véritable et non la science que donnent les livres, savoir qui lui a permis de récolter dans les livres où elles étaient dispersées les vérités qui, assemblées, forment un tout grandiose. C'est d'avoir possédé le fil conducteur et d'avoir pu le suivre [54] avec une exactitude sans défaillance à travers le labyrinthe et d'avoir montré que tous les matériaux épars recélaient en eux-mêmes la possibilité de l'édifice unique.
Et son oeuvre est d'autant plus admirable du fait qu'elle la produisit sans être une savante ; parce qu'elle la fit sans avoir eu l'éducation qui lui eût, jusqu'à un certain point, permis de composer cette sagesse de pièces et de morceaux, parce qu'elle fit ce que nul orientaliste n'a fait avec toute sa science, ce que tous les orientalistes réunis et aidés de leur connaissance des langues orientales et de la littérature de l'Orient n'ont pas fait. Il n'y en a pas un parmi eux qui eût tiré de cette masse confuse une synthèse puissante, pas un qui, de ce chaos, eût été capable d'édifier un monde. Mais cette femme russe, d'éducation moyenne, cette femme russe, qui n'était pas une érudite et ne prétendait pas en être une, dut par un moyen quelconque acquérir une érudition qui lui permit de faire ce qu'aucun de vos érudits ne peut faire ; par une voie quelconque, elle reçut un enseignement qui lui permit d'organiser ce chaos et de mettre sur pied un plan grandiose d'évolution qui nous rend compréhensibles l'univers et l'homme. Elle disait que cette sagesse ne lui appartenait pas, elle ne prétendit jamais l'avoir créée ; elle [55] parlait sans cesse de son manque de savoir et se référait à Ceux qui lui donnaient l'enseignement. Mais le fait auquel vous avez affaire est celui-ci : la science est là et s'offre à la critique. Il n'est pas une autre personne qui ait produit la même chose quoique les mêmes matériaux dont elle s'est servie, suivant M. Coleman, soient à la disposition du monde entier.
Et voici ma réponse : donnez-nous d'autres écrivains qui puissent faire comme elle. Donnez-nous encore de ces plagiaires capables de recueillir à tant de sources différentes ce qui est nécessaire pour construire une philosophie puissante. Que ce soit là l'oeuvre de vos savants tant vantés et qu'ils nous aident comme elle à comprendre les religions du monde. Qu'ils nous montrent leur identité, qu'ils nous montrent leur réalité et peut-être après cela modifierons-nous l'opinion que nous avons d'elle ; mais jusqu'à ce que cela soit accompli ses droits demeurent entiers, quand même vous arriveriez à prouver qu'elle a pu errer en maintes occasions, quand même ceux-là qui ne peuvent rivaliser avec elle d'altruisme, d'abnégation de soi-même et de savoir, voudraient la lapider. La raison qui fait que notre foi en elle demeure inébranlable est qu'elle nous a guidés vers le savoir, que par son enseignement nous [56] avons acquis ce que nul autre n'a pu nous donner, qu'elle nous a ouvert la voie vers l'acquisition de plus de connaissance dans le même ordre d'idées et par l'entremise des mêmes Instructeurs qui l'instruisirent elle-même. Voilà pourquoi nous sommes assez sots, à ce que pensent les gens, pour lui rester fidèles, à elle et à sa mémoire, car nous avons contracté envers elle une dette de reconnaissance telle que nous ne serons jamais à même de l'acquitter, et jamais une pierre ne sera lancée sur sa tombe que je n'essaie de l'en faire disparaitre, pour l'amour du savoir vers lequel elle m'a conduite et le don inappréciable qu'elle me fit par l'enseignement qu'elle créa.
Le témoignage que je vous demande de recueillir d'elle n'est pas celui des phénomènes. Celui-là je le mets à part. Ce n'est pas non plus celui de l'érudition, elle n'en avait pas et ne s'en est jamais réclamée. Ce n'est pas enfin de décider si sa vie depuis son enfance fut un modèle de perfection. C'est qu'elle possédait un savoir défini, acquis d'une manière quelconque, et qui ne peut être attribué à une éducation ordinaire, qu'elle se l'assimila en une période de temps relativement courte, étonnant sa propre famille quand elle le produisit pour la première fois, et qu'elle disait le tenir de [57] certains Instructeurs, le fait important étant qu'elle possédait cette connaissance, de quelque manière qu'elle se la fût appropriée. Voilà la preuve que je désire mettre en relief, parce que c'est un point qui ne peut être contesté et qui pour le moment dégage son témoignage de toute la question de supercherie. Il reste au-dessus et au-delà de cette question. Je prétends que même si vous trouviez convaincant le témoignage employé contre elle qu'elle alla quelquefois au-delà de la vérité (je ne dis pas que je croie qu'il en soit ainsi mais supposons que vous en soyez convaincus) cela n'y changerait rien. Le fait demeure de cette science incarnée dans la Doctrine Secrète qui lui sert de témoin qu'on ne peut, j'ose le dire, récuser, et plus vous abaissez l'auteur, moins vous l'estimez, plus vous prouvez l'existence des grands Êtres et exaltez Ceux dont elle fut l'instrument et qui lui donnèrent ce qu'elle produisit.


LA VOIX DU SILENCE


À présent, il est une autre question à propos d'un autre de ses livres qui m'intéresse tout particulièrement. C'est un livre que vous connaissez peut-être : la Voix du Silence. Il se trouva qu'elle écrivit ce livre justement pendant que j'étais avec elle à Fontainebleau. C'est un petit livre et ce que j'en vais dire se rapporte uniquement au livre et non aux notes ; celles-ci furent écrites plus tard. Le livre en lui-même est ce qu'on peut appeler un poème en prose divisé en trois parties. Elle l'écrivit à Fontainebleau et, pour la plus grande part, pendant que j'étais avec elle, me tenant dans la chambre pendant qu'elle l'écrivait. Je sais qu'elle le composa sans consulter aucun livre mais écrivant heure après heure sans interruption, exactement comme si elle le transcrivait de mémoire ou d'un livre invisible où elle aurait lu. Elle montra dans la soirée ce manuscrit que je lui avais vu écrire pendant que nous étions ensemble et me demanda ainsi qu'à d'autres personnes d'en corriger la forme anglaise, car elle l'avait écrit si vite, disait-elle, qu'elle était surement défectueuse. Nous [59] n'y changeâmes que quelques mots et ce livre demeure un chef-d'oeuvre de merveilleuse beauté littéraire auquel rien ne peut être comparé. Or M. Coleman dit pouvoir trouver la même chose dans beaucoup d'autres livres. Je ne peux que souhaiter qu'il n'ait pas lu le livre avant de faire cette déclaration. Car c'est, comme je l'ai dit, un poème en prose, plein d'inspiration spirituelle, de nourriture pour le coeur, qui stimule les vertus les plus sublimes et contient les idéals les plus nobles. Ce n'est pas un potpourri tiré à des sources diverses, mais un tout cohérent dans sa beauté. Il nous émeut, non par l'énoncé de faits recueillis dans les livres, mais par son appel aux instincts les plus divins de notre nature. Il est à lui-même son meilleur témoignage de la source d'où il jaillit.


CONNAISSANCE PERSONNELLE


Passons à présent de Mme Blavatsky elle-même à ceux qu'elle instruisit. Notre président est l'un de ceux-là. Beaucoup d'autres vivent ici et ailleurs qu'elle commença d'instruire et qui passèrent ensuite de sa discipline à celle de ses Instructeurs. Voici donc [60] des témoignages accumulés venant d'hommes et de femmes qui, de leur propre autorité, par des témoignages directs basés sur leur expérience personnelle, attestent la réalité de l'existence de ces Instructeurs, la connaissance personnelle qu'ils ont d'Eux et la réalité de l'enseignement qu'ils ont reçu d'Eux.
J'ai déposé la semaine passée dans deux de vos journaux une faible partie de mon propre témoignage. M. Sinnett, aujourd'hui, dans son discours d'ouverture a fait allusion à une certitude s'étendant dans son cas à une période de plus de quinze années. Beaucoup d'autres ont fait de même, comme la comtesse Wachtmeister, le colonel Olcott et d'autres qui ont donné leur propre témoignage individuel. Est-ce à dire qu'ils sont tous des fripons ? De quel droit les condamneriez-vous de la sorte ? Ou direz-vous que ce sont tous des sots ? Mais ce sont des hommes et des femmes menant une vie normale, des êtres qui, aux yeux de ceux qui les connaissent, passent pour des personnes douées d'éducation et d'intelligence et possédant les mêmes facultés de discernement et de savoir que les autres. Va-t-on dire que nous sommes tous fous ? C'est porter un jugement plutôt téméraire sur un nombre toujours croissant d'hommes et de femmes en apparence [61] raisonnables. Quel témoignage autre pouvez-vous désirer de l'existence de qui que ce soit que celui de ceux qui le connaissent, de gens honorables et intègres qui vivent parmi vous ? Nous donnons à ces grands Êtres notre témoignage personnel, fondé, non sur des documents, non sur des écrits, non sur de simples lettres et autres choses de ce genre prêtant toujours à quelque possibilité de supercherie, mais bien sur une communion individuelle avec des Instructeurs individuels, et sur un enseignement reçu que nous n'eussions pu acquérir d'autre façon. Voilà le genre de certitude auquel vous avez affaire et le fait d'établir la supercherie pratiquée par deux ou trois personnes ne détruira pas le témoignage toujours grandissant de gens raisonnables qui entrent en rapport avec ces Instructeurs et certifient ce qu'ils savent par eux-mêmes. Voilà le genre de certitude avec lequel vous devez vous mesurer, voilà le genre de témoignages qu'il vous faut récuser. Et quelque plaisir que vous puissiez prendre à la lecture d'un écrit habile et bien tourné qui prend avantage de la supercherie d'une seule personne pour discréditer la masse, vous ne pouvez pas plus discréditer cette masse de
témoignages en prouvant la mauvaise foi d'un homme que vous ne pouvez mettre en [62] doute, mettons l'authenticité de la monnaie vraie parce que dans une société un faux monnayeur fait circuler de la fausse monnaie et que pendant un certain temps le public peut s'y tromper et la laisser passer.
Mais vous pouvez dire : "Nous demandons à acquérir personnellement une certitude directe." Vous pouvez vous la procurer mais il vous faut employer le bon moyen. Vous pouvez acquérir une certitude équivalant pour vous à une démonstration si vous voulez bien en prendre la peine, si vous consentez à y consacrer le temps voulu. Cette condition n'a rien de déraisonnable. Si vous désirez vérifier par vous-mêmes les expériences de quelque grand chimiste, suffira-t-il que vous entriez dans un laboratoire et que vous mélangiez les produits qui s'y trouvent ? Si vous voulez vérifier quelqu'une des plus récentes expériences de chimie, croyez-vous pouvoir le faire sans consacrer des années de peine et d'étude à passer maitres en cette science qui doit servir de base à votre expérience critique ? Et quelle valeur attacheriez-vous à la critique d'une personne absolument ignorante en chimie, qui dirait qu'une expérience ne peut réussir, uniquement parce qu'elle-même serait incapable de la mener à bien sans étude et sans savoir ? [63]


LE CHEMIN DE L'ADEPTAT


C'est pourquoi je vous ai promis de vous décrire l'évolution du Mahatma. Car ceux-là seuls qui sont décidés à viser ce but peuvent recevoir la démonstration absolue de l'existence de Ceux qui l'ont atteint. Tel est le prix qu'il faut y mettre. Hors de cela, il ne reste que des probabilités, probabilités vraisemblables en vérité telles que le témoignage d'autres personnes dont vous vous contenteriez en d'autres matières et sur la foi desquelles vous transfèreriez en justice des sommes d'argent considérables, d'importantes propriétés ou toute autre chose, probabilités qui s'offrent à vous à l'examen de la certitude existante dont je n'ai donné ici qu'un aperçu. Mais pour arriver à la démonstration personnelle, il faut commencer à orienter votre développement dans le sens où le Leur s'est accompli ; et, afin que tout homme qui le désire puisse commencer à suivre cette voie et la poursuivre jusqu'à son point d'arrivée naturel, les degrés préliminaires du Sentier ont été révélés au monde, degrés que gravissent ceux qui atteignent la sagesse, degrés que chacun peut commencer à gravir et grâce [64] auxquels il peut à son tour acquérir une certitude semblable à celle que quelques-uns d'entre nous possèdent. Deux petits livres, en particulier, ont été publiés qui décrivent l'entrée du Sentier, l'un se nomme la Lumière sur le Sentier, l'autre, celui dont j'ai parlé plus haut : la Voix du Silence ; et de plus, il y a, éparses dans la littérature théosophique, beaucoup d'indications qui deviennent de plus en plus nombreuses, à mesure qu'avec le temps l'expérience individuelle des disciples s'accroit. Comment doivent donc commencer les hommes ordinaires ? S'ils désirent se procurer à eux-mêmes une certitude, quant à la possibilité de ce développement qui, lorsqu'il sera terminé, aboutira à l'Homme parfait – l'homme devenu divin – les premiers pas à faire seront ceux qu'enseigne toute religion : vivre avec attention et sans égoïsme, accomplir le devoir, quelque place dans le monde qu'on occupe. Pour employer la phrase du livre : "Suis la roue du devoir envers race et famille, ami et ennemi" (Voix du Silence), car ceux qui veulent acquérir la Science de l'âme doivent commencer ainsi, comme il a toujours été enseigné, par renoncer à la loi mauvaise et par suivre la bonne ; par la pureté de la vie, le service de l'humanité, l'effort dépouillé d'égoïsme et sans cesse répété en vue [65] de se rendre utiles en quelque endroit qu'ils aient été placés par la loi de la nature. L'effort qui tend à s'acquitter le plus complètement possible de toute obligation, à vivre une vie qui laisse le monde meilleur qu'ils ne l'ont trouvé, à vivre noblement, sans égoïsme et purement est une condition imposée à ceux qui veulent trouver le Sentier.


RÉINCARNATION


Et à présent laissez-moi vous dire qu'à moins que la réincarnation ne soit une réalité, ce développement n'est pas possible. Ce Sentier ne peut être parcouru en une seule vie humaine ; ces divines facultés ne peuvent être développées dans une âme-enfant. À moins qu'il ne soit vrai que l'âme de l'homme revienne sur terre vie après vie, apportant avec elle dans chaque existence nouvelle l'expérience des vies antérieures, construisant vie après vie, et de plus en plus haut, l'édifice du caractère, en vérité le Mahatma devient une impossibilité et la perfection humaine n'est que le rêve d'un poète. Dans tout cet enseignement la réincarnation est supposée admise comme un fait fondamental [66] de la nature d'où dépend la possibilité de la perfection individuelle.


VIVEZ NOBLEMENT


Avant tout, donc, l'homme s'appliquera à travers de nombreuses vies à vivre bien, utilement et noblement ; afin que, vie après vie, il puisse revenir avec des qualités de plus en plus hautes et des facultés de plus en plus nobles. Puis il arrive à un stade marqué et défini de l'évolution humaine où l'âme, après avoir longtemps lutté pour s'élever, parvient à dépasser un peu l'évolution humaine ordinaire.
Il y a des êtres dépourvus d'égoïsme à un point exceptionnel, qui montrent des facultés, une intuition, un amour exceptionnels pour les choses spirituelles, un dévouement exceptionnel aussi, au service de l'humanité. Lorsque ces qualités d'exception commencent à se manifester le moment vient où l'un des grands Instructeurs prend cette personne en main individuellement afin de guider son évolution ultérieure et d'exercer son âme en devenir. Les premiers efforts doivent être faits de concert avec les grandes forces spirituelles répandues à travers le monde entier. Mais lorsque celles-ci [67] ont été utilisées, lorsque l'homme a fait, pour ainsi dire, de son mieux dans cette direction de croissance spirituelle d'ordre général, il arrive au stade où parait l'Instructeur pour le guider dans la suite de l'évolution et certaines conditions sont alors posées à la continuation de cette évolution. Celles-ci sont exposées dans les livres dont j'ai parlé. Résumées en une phrase ou plutôt en deux, elles pourraient être appelées : la connaissance de la non-séparativité, ce que je vais expliquer tout à l'heure, et la rigide discipline du soi. D'une part, non-séparativité, de l'autre discipline personnelle. Or, non-séparativité est un mot technique qui signifie que l'on est intimement convaincu de son unité fondamentale avec tout ce qui vit et respire, que l'on ne s'isole d'aucun être vivant, que l'on ne se sent séparé ni du pécheur, ni du saint, ni du membre le plus élevé, ni du plus bas de l'humanité, non pas même des formes inférieures, des choses vivantes ni de celles appelées inertes que l'on reconnait former un seul tout dans leur essence et n'être qu'un avec son Soi le plus intime. Comment cela se manifeste-t-il ? Par l'effort volontaire et l'entrainement délibéré vers l'identification de soi-même avec les souffrances, avec les sentiments, avec les désirs de l'humanité. [68]
Il est dit :
"Laisse ton âme prêter l'oreille à tout cri de douleur comme le lotus met son coeur à nu pour boire le soleil matinal. Ne permets pas à l'ardent soleil de sécher une seule larme de souffrance, avant que tu n'aies toi-même essuyé les yeux affligés. Mais laisse toute larme humaine tomber brulante sur ton coeur et y rester, et ne l'efface jamais avant que soit disparue la douleur qui l'a causée."

La Voix du Silence

Voici la première note donnée. Va vers celui qui souffre et soulage sa douleur, mais en la soulageant, laisse-la torturer ton propre coeur et qu'elle y demeure comme une peine constante tant que la cause de cette douleur n'aura pas été écartée. C'est le premier degré de la non-séparativité. Identifiez-vous avec les douleurs et les joies du monde, que tout chagrin humain soit votre chagrin, toute souffrance, votre souffrance, toute joie, votre joie. Votre coeur, vous dit-on, doit répondre à tout frisson d'un autre coeur comme la corde qui vibre au diapason de la note musicale selon laquelle elle est accordée.
Il vous faut ressentir la souffrance et l'angoisse, que dis-je, ressentir le péché et la honte comme votre propre péché et votre propre honte, les incorporer à votre conscience et ne jamais chercher à vous en débarrasser. Il faut [69] vous entrainer à une sensitivité capable de vibrer à toute souffrance humaine et il faut la manifester par vos actes autant que par vos sentiments, car il est dit : "L'omission d'un acte de pitié devient une commission de péché Mortel." 2
Mais il ne suffit pas que vous ressentiez effectivement la souffrance du monde et que vous la fassiez vôtre ; il vous faut être aussi durs pour vous-mêmes que vous êtes tendres pour ceux qui vous entourent. Vous n'avez pas de temps à consacrer à vos peines personnelles si vous devez faire vôtre toute la peine de l'humanité ; vous n'avez pas de forces à dépenser en lamentations sur vos propres chagrins si vous devez vous identifier avec tous les chagrins du monde. Et c'est pourquoi il est dit qu'il faut que vous soyez aussi durs envers vos propres douleurs et vos tristesses personnelles que le noyau du fruit du manguier, tandis que vous serez aussi tendres que sa pulpe aux douleurs et aux tristesses des autres.
2 La Voix du Silence.


FRATERNITÉ


C'est ainsi que vous devrez vous exercer vie après vie à vous identifier de plus en plus avec tous les êtres, à briser toutes les barrières qui séparent l'homme des autres hommes. Voilà pourquoi la fraternité est la seule condition que nous imposions parce que le fait d'en reconnaitre le principe est le premier pas vers cette constatation de la non-séparativité qui est nécessaire au progrès du disciple. Le système défini d'entrainement auquel est soumis le disciple le rend sensible aux douleurs de tous afin que, les ressentant, il s'empresse à les soulager, et il l'entraine à cette identification du soi avec tous qui doit faire de lui finalement l'un des Sauveurs du monde. Car à mesure que cet entrainement se déroule de vie en vie, il développe graduellement en l'être humain une sympathie toujours croissante, une compassion toujours plus profonde, une charité que rien ne peut troubler et une tolérance inébranlable. Nulle offense ne peut être ressentie car le chagrin est éprouvé pour l'offenseur et non à cause du coup reçu ; nulle colère ne peut être provoquée par un tort quelconque, [71] car vous comprenez la cause qui a fait commettre ce tort et vous êtes peiné pour son auteur, il ne vous reste pas de temps pour la colère. Vous n'excuserez pas le mal, vous ne direz pas que le mal est un bien, vous ne prétendrez pas que le bien est un mal, car cela serait de la dernière cruauté et rendrait impossible le progrès de la race. Mais, tout en constatant le mal, vous n'éprouverez aucune colère contre son auteur car il ne fait qu'un avec votre propre âme et vous ne ressentez rien qui vous sépare de lui.
Pourquoi tout ceci ? Parce que, à mesure que cette croissance s'effectue, la mémoire et la sagesse grandissent elles aussi ; parce que, tandis que ce progrès s'effectue, la vie spirituelle grandissante du disciple devient de plus en plus apparente aux yeux des hommes, et que finalement il sera désigné comme un travailleur dévoué à la cause de l'homme, un aide de bonne volonté et un ouvrier assidu à la tâche de l'humanité, travaillant pour elle à diminuer son ignorance, à lui apporter la sagesse et à lui montrer la réalité cachée derrière toutes les illusions du monde. Il lui faut être dur envers lui-même car il doit se placer entre le mal et l'homme, il doit se tenir entre ses frères plus faibles et les forces noires qui sans lui [72] pourraient les écraser. On peut ajouter, pour illustrer ce qui vient d'être dit sur ce que doit être le disciple, qu'il doit être comme un astre qui donne à tous la clarté et n'en emprunte à personne ; comme la neige qui intercepte le froid et la morsure du vent, pour permettre aux semences qu'elle recouvre de dormir à l'abri du froid et de pouvoir germer quand viendra la saison de la croissance. Tel est l'entrainement auquel les divins Instructeurs demandent qu'on se soumette ; voilà ce qu'ils réclament de ceux qui désirent devenir disciples. C'est l'essai qu'ils exigent tout d'abord et non l'accomplissement, l'effort pour commencer et non la perfection ; non certes la réalisation de l'idéal mais sa poursuite malgré les chutes et en dépit des erreurs. Et, je vous le demande, est-il vraisemblable que ceux d'entre nous qui se représentent clairement cet idéal et qui savent que c'est cela que nos Instructeurs nous demandent, agissent en ennemis de la société et soient autre chose que des serviteurs de l'humanité par obéissance pour Ceux dont ils aspirent à suivre la loi ?
Enfin, comme je l'ai dit, le moment arrive où les faiblesses humaines sont rejetées, où la fragilité de la nature humaine se trouve avoir été peu à peu surmontée, où une compassion que rien ne peut ébranler, une pureté que rien ne [73] peut souiller, une science puissante et une spiritualité capable de faire sentir son influence, où toutes ces qualités deviennent les caractéristiques du disciple qui approche du seuil de la libération jusqu'à ce que luise le jour où la course sur ce sentier prend fin, l'instant où l'apprentissage du disciple est terminé et où se présente à ses yeux le degré le plus sublime que puisse atteindre l'Homme parfait. Alors, pour un instant, la terre s'efface, si l'on peut dire, à l'arrière-plan ; le disciple, l'Âme libérée comme on l'appelle, l'âme qui a conquis sa liberté et s'est affranchie des limitations humaines, se dresse au seuil du Nirvana, de cet état de conscience parfaite et de béatitude qui dépasse les conceptions de la pensée humaine, qui dépasse ce que peut ressentir notre conscience limitée. À cet instant, on nous dit que tout fait silence : silence de la Nature que l'un de ses enfants est en train de dépasser, silence que rien n'interrompt pour un temps, quand l'âme a consommé sa libération.
Silence partout, mais une voix vient le rompre, voix qui exprime en un cri unique toute la détresse du monde laissé en arrière, le cri que pousse l'univers du fond de ses ténèbres, de sa misère, de sa famine spirituelle, de l'abime de dégradation morale où il est plongé. Et, dans [74] le silence qui entoure l'âme libérée, ce cri qui s'élève est le cri de détresse de la race humaine vers l'âme qui a dépassé ses soeurs, vers l'âme qui est libre tandis que les autres demeurent enchainées.


LE SENTIMENT DE L'UNITÉ


Comment le disciple pourrait-il continuer sa route ? Vie après vie, il a appris à s'identifier avec les hommes, vie après vie, il a appris à répondre à tout cri de douleur. Pourra-t-il avancer librement tandis que d'autres restent captifs ? Pourra-t-il se plonger dans la béatitude tandis que l'univers souffre ? Celui que nous nommons Mahatma est l'Âme libérée qui a le droit de passer outre, mais qui, pour l'amour de l'humanité, revient sur ses pas, offre son savoir pour aider l'ignorance, sa pureté pour purifier l'opprobre, sa lumière pour chasser les ténèbres, et qui reprend le fardeau de la chair jusqu'à ce que toute la race humaine soit libérée comme lui et qu'il puisse s'avancer, non pas seul, mais comme père d'une famille imposante, amenant avec lui l'humanité pour toucher ensemble le but commun et partager la commune béatitude en Nirvana. Voilà ce [75] qu'est le Mahatma. Il couronne tant de vies d'efforts par le suprême renoncement, il revient sur ses pas et la perfection obtenue par le travail et la lutte, il l'emploie à aider les autres à atteindre le degré où il est parvenu. Sa main est prête à secourir tout être qui tend vers lui les bras. Son coeur répond au cri de chacun de ses frères en humanité qui implore son aide. Tous Ils attendent, enfin, que nous voulions bien être instruits et leur donner l'occasion de nous aider, à Eux qui pour nous l'assurer ont renoncé au Nirvana.


IDÉAL SUBLIME


Est-ce là un idéal qui prête au rire, à la raillerie, qui doive être tourné en dérision ? Si ce n'est qu'un rêve c'est le plus noble rêve qu'ait fait l'humanité ; c'est l'idéal le plus fécond en inspiration et en renoncement. Pour quelques-uns c'est un fait, un fait plus réel que la vie. Pour ceux aux yeux desquels ce n'est pas un fait, cela peut être un idéal, idéal de sacrifice, de sagesse et d'amour. Quelques-uns d'entre nous savent que de tels Hommes existent. Mais quand bien même vous ne croiriez pas en Eux, il n'y a rien dans cet idéal qui ne soit noble et [76] dont la pensée ne puisse vous élever de plus en plus vers la lumière. Le chrétien possède le même idéal en la personne du Christ, le bouddhiste en celle du Bouddha. Chaque religion place son idéal en l'Homme qu'elle considère comme divin. Et nous rendons à chaque religion le témoignage que son idéal est vrai et non faux, son Instructeur, une réalité et non un rêve ; car le Maitre est la réalisation de ce que laisse espérer le disciple, la réalisation de l'idéal que nous adorons. Pour certains d'entre nous ces Divins Instructeurs dont nous connaissons l'existence sont une source d'inspiration journalière. Nous ne pouvons entrer en contact avec Eux qu'en nous efforçant de nous purifier. Nous ne pouvons en apprendre plus long qu'en mettant en pratique ce qu'ils ont déjà enseigné. Si j'ai parlé ici ce soir d'abord du point de vue théorique, puis du point de vue historique, puis du témoignage que nous vous fournissons dans le présent et enfin des étapes que chacun peut parcourir s'il le veut, c'est parce que je veux dégager cet idéal de tout le ridicule dont il a été accablé, de toute la boue dont on l'a couvert, de toutes les querelles, de toutes les disputes dont on l'a entouré. Blâmez-nous si vous le voulez, mais ne touchez pas à ce noble idéal de perfection humaine. Riez de [77] nous, si vous le voulez, mais ne riez pas de l'Homme parfait, de l'Homme fait Dieu, en qui, à tout prendre, croient la plupart d'entre vous. Vous qui êtes Chrétiens, ne soyez pas traitres à votre religion, et ne faites pas de votre Christ une question de dogme au lieu d'une réalité vivante que beaucoup d'entre vous savent qu'il est aujourd'hui. Rappelez-vous que, quel que soit le nom, l'idéal reste le même ; quel que soit le titre, la pensée qu'il recouvre est identique.
Votre développement suivra votre pensée, vos vies deviendront peu à peu conformes à vos idéals. Car tel est le pouvoir de transformation qui réside dans la pensée que si votre idéal est vil, votre vie le sera également, si votre idéal est matériel, matérielle sera votre vie. Adoptez donc cet idéal et pensez-y et vos vies seront pénétrées de sa pureté ; vous deviendrez des hommes plus nobles parce qu'il sera le sujet de vos pensées et que vos pensées vous transforment à leur propre image. Il est vrai que les hommes ressemblent à ce qu'ils adorent, il est vrai qu'ils ressemblent à ce à quoi ils pensent. Quant à cet idéal de l'Homme parfait, il contient l'espérance de l'avenir de la race. C'est pourquoi je prends sa défense devant vous aujourd'hui et je vous montre le [78] Sentier grâce auquel il peut d'un idéal devenir une réalité vivante, transformant ainsi un simple espoir en un vivant Instructeur et l'idéal éthéré auquel vous aspirez en un Ami et un Maitre auquel vous pouvez consacrer votre vie.