LIVRE
PRÉFACE
Les quatre conférences contenues dans ce volume ont été faites en présence des délégués et des membres de la Société Théosophique, lors de la Convention annuelle à Adyar-Madras, les 27, 28, 29 et 30 décembre 1893, dans le but de montrer à quel point les enseignements de H. P. Blavatsky éclaircissent le sens profond des livres sacrés indous, et de justifier en même temps l'utilité des doctrines théosophiques et indoues. Elles avaient encore pour but de faire ressortir l'identité de ces doctrines ; de prouver que celui qui croit aux enseignements théosophiques doit accepter ceux des Védas et des Pourânas sur les questions fondamentales ; que la Théosophie est un fragment de la Brahma-Vidyâ ou Sagesse divine des temps pré-védiques ; que les Shroutis sont les meilleurs exposés exotériques de cette Brahma-Vidyâ ; que les Pourânas avaient pour but de donner, à ceux qui ne pouvaient pas étudier les Védas, les vérités spirituelles contenues dans ceux-ci, et cela sous une forme concrète et facile à comprendre. Telles sont les idées que ces conférences se proposaient d'exprimer.
Mon acquiescement aux enseignements théosophiques [8] impliqua pour moi, dès le début, mon acquiescement aux Écritures indoues, comme étant la mine d'où devait être extrait l'or de la Connaissance spirituelle. En tant que philosophie, la Théosophie peut, au point de vue intellectuel, être considérée comme distincte de l'Indouisme et de toute autre religion, bien qu'elle soit sur beaucoup de points la reproduction de la Védânta-Advaita ; mais si l'on veut extraire de la Théosophie un aliment de spiritualité, si on l'enseigne à la fois comme religion et comme philosophie, alors c'est dans l'Indouisme que le besoin d'adoration trouvera sa satisfaction la plus profonde, l'Indouisme étant l'exposé exotérique de Théosophie le plus ancien et le plus complet. Je ne veux pas dire que la dévotion ne puisse pas s'accommoder des différents cultes religieux, et que le fidèle d'une religion, en devenant théosophe, ne cherchera pas et ne trouvera pas dans sa religion la nourriture spirituelle qu'il désire. Mais si, comme moi, il devient théosophe après avoir été matérialiste, il adoptera très probablement pour sa dévotion les anciennes formes sanscrites conservées dans l'Indouisme, formes que ses études intellectuelles et philosophiques lui auront rendu familières. La Théosophie m'a donné satisfaction non seulement au point de vue intellectuel, mais aussi au point de vue dévotionnel, et c'est dans l'Indouisme que la Théosophie dévotionnelle trouve son expression la plus ancienne et la plus naturelle. L'étudiant de la Brahma-Vidyâ peut ainsi, en tant que Bhakta, devenir également [9] Indou, en reconnaissant que Gnyânam et Bhakti sont toutes deux nécessaires à l'évolution de la vie spirituelle.
Ce qui précède m'a paru nécessaire pour expliquer ma propre attitude de Théosophe et d'Indoue, qui s'affirmera au cours de ces conférences, et pour repousser l'absurde légende suivant laquelle je me serais convertie à l'Indouisme depuis mon arrivée dans l'Inde. Je suis devenue Indoue tout en acceptant pleinement et entièrement la Théosophie telle qu'elle est enseignée par les Occultistes, et il n'y a eu là aucun changement, sauf que j'ai gagné une vision toujours plus claire, une connaissance toujours plus étendue et une satisfaction de plus en plus profonde depuis que j'ai embrassé ces enseignements en 1889.
Annie BESANT.
Ludhiana, février 1894.